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Wu-Wei
Hommes et femmes de tous âges, ils viennent de Chine, de la ville de Dalian. Yoann Bourgeois a été invité à rencontrer ces artistes dans leur pays. Il a voyagé vers eux avec le désir d’approcher l’art ancestral de l’acrobatie chinoise. Sur scène, huit musiciens du Balkan Baroque Band entament Les Quatre Saisons de Vivaldi. Véritable ligne temporelle du spectacle, l’œuvre musicale apporte à chaque geste une teinte, l’impression d’une coloration.
Dans Wu-Wei, l’hétérogénéité des capacités physiques se dévoile par des motifs chorégraphiques simples. Des élans de marches ou de courses délivrent la part émouvante de ces différents états de corps. Cette simplicité donne au spectacle la fraicheur d’une gaité joueuse. Sur scène, dans un espace dépouillé, des actions apparaissent, disparaissent et s’épanouissent en tableaux. Si une figure acrobatique surgit dans ce défilement d’apparitions, elle viendra se fondre dans le grand univers des actions humaines. Tirer un cerf volant, courir à travers champ, jouer à se battre, costumer quelqu’un ou bien flâner à bicyclette, l’impression de légèreté de ces activités rencontre en fond de scène l’évocation de la grande Histoire. Par les traces visuelles d’une écriture, des dates historiques apparaissent et se lient à l’intimité d’un prénom.
A travers les portraits de ces instants de vie, la scène se charge d’une multiplicité d’époques. Le spectacle Wu-Wei peut se voir comme la tentative de matérialiser le temps. Il existe en Chine une pensée de la durée liée à la saison. Être de saison, c’est savoir accompagner les processus de la nature. Cette position face au monde pousse à ne pas intervenir pour justement laisser advenir. Sagesse de se laisser traverser par les forces plutôt que forcer les choses, Wu-Wei est cette capacité du non agir.
Le wu-wei
Le «wu-wei» est une notion du taoïsme dont la traduction littérale pourrait être « le non-agir ». Mais cette traduction ne doit pas être entendue comme signe d’immobilisme ou de passivité. Il s’agirait plutôt d’une action sans force, d’un accord avec un sens naturel et originel. On trouve cette pensée dans le livre légendaire de Lao Tzeu -le Daodejing, écrit au IVe siècle avant JC- qui présente l’un des fondements du taoïsme.
Note d’intention
« Lors de mon premier voyage en Chine j’ai découvert le genre « Opéra de Pékin ». Par sa pluridisciplinarité intrinsèque, par la discontinuité intensive de son écriture, par la relation musicale ou théâtrale de ses gestes acrobatiques, j’ai vu dans l’Opéra de Pékin un certain nombre de correspondances et d’analogies qui fondent cette fraternité avec ce que nous appelons en France depuis bientôt quarante ans « le nouveau cirque ». Cette transversalité entre ces deux cultures a priori éloignées, a suscité un désir de rencontre, puis une création.
Ce n’est pas un spectacle sur la Chine. C’est un poème écrit à partir de ces onze chinois là. J’ai écrit ce poème parce que j’ai été touché par chacun d’entre eux, au-delà des mots. Ces onze artistes qui ne sont pas seulement acteurs, acrobates ou danseurs. J’ai cherché chacune de ces personnes tout au long de notre création, en slalomant entre les masques, les fonctions sociales, les conventions, les modes d’être, etc. La vulnérabilité qui touche chacun de ces êtres d’âges différents n’est pas la même. J’espère redonner un peu de cette vulnérabilité, qui rend chaque personne bouleversante. »
Source : Yoann Bourgeois