Ce contenu contient des scènes pouvant choquer un public non averti.
Souhaitez-vous tout de même le visionner ?
UMWELT de l'autre côté des miroirs
Ce qui n’est pas vu, ce qui est caché
En fond de plateau, se déroule une autre chorégraphie, minutée au millimètre où chacun joue d’abord pour lui-même : pas de temps à donner pour une attention particulière extérieure à ce qui est à faire, s’attarder pour aider quelqu’un, rêver, tout est compté et chacun, pour ne manquer aucune de ses entrées à la face visible des spectateurs, est tenu à une autonomie implacable, ne peut compter que sur lui-même, dans une sorte de jungle faite d’individualisme et d’ordre qui n’accepte, en principe, aucun pas de côté. Chacun se doit d’avoir des gestes excessivement précis pour saisir ses accessoires, se déshabiller, changer de costume, tout en continuant à suivre pendant ce temps ce qui a lieu à la face, qui est donné à voir au public.
Pour la mise en œuvre de ce travail, et malgré des difficultés liées à la multitude de vignettes, au changement de costumes, au bruit intense de la musique, se sont créés et plus fortes encore que la débrouille individuelle à s’en sortir, des solidarités, des entraides qui ont rendu possible l’articulation de plusieurs entrées, tenues pour impossible à réaliser. Si l’avant-scène donne l’image d’un paysage en déroute, un avenir obstrué par le chacun pour soi, à l’inverse, l’arrière scène porte en elle l’image de ce qui, jusqu’à aujourd’hui n’a cessé de contenir un tant soit peu le malheur : le besoin commun d’agir ensemble pour contribuer au bien-être de tous.
«Le plus utile, pour les hommes, est de s’attacher par des relations sociales, de se soumettre à des liens qui leur permettent de faire de tous un seul ensemble, et, d’une façon générale, de faire tout ce qui rend les amitiés plus solides. »
Spinoza – Ethique – Partie IV Chapitre XII
Ce film, loin d’être une captation de plus, entremêle les deux faces du spectacle : le plan frontal vu depuis une salle de théâtre, et celui, invisible pour les spectateurs, de l’autre côté des miroirs.
Une réalisation où l’on pourra découvrir et suivre une dramaturgie très différente et rarement observée et cependant complémentaire de celle qui se déroule sur scène. Cette immersion renforce l’impression du temps réel du spectacle et donne à sentir l’urgence et le vertige du minutieux travail d’interprétation collective à l’œuvre au milieu de la tempête.
David Mambouch et Maguy Marin.