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Moto-cross
Moto-cross est comme un filet lancé derrière soi. Un regard tourné vers un passé, celui de Maud Le Pladec, ainsi que l’actualité politique et musicale française depuis les années 1980. Dans un premier temps il s’est agi d’une démarche mémorielle, d’un principe d’ « aller à la pêche », de ramasser ce qui surnage, indistinctement, puis de filtrer et de recueillir ce qui fait sens. Dans un deuxième temps, de mettre en perspective ce récit de vie pour qu’il devienne un moyen d’aller vers l’autre. La dimension autobiographique du projet devenant autofictionnelle, le récit de vie glissant vers une légende personnelle.
Cette légende, Maud Le Pladec l’écrit avec l’auteur Vincent Thomasset. Dans une posture gonzoide(1), Vincent Thomasset s’approprie l’histoire de la chorégraphe, en prenant des libertés avec les vérités. Dans un style d’écriture ultra-subjectif, il s’exprime à la première personne avec un point de vue déformant de la réalité. Le contexte d’émergence du récit est fictionné pour apparaître plus réel que le réel lui-même. Cette fiction permettant d’amener le spectateur dans l’antre de sa conscience, dans la mesure où elle retranscrit mieux le vaste sujet qu’est l’existence de l’homme.
Cette démarche rétrospective permet de dégager des périodes clés, des figures historiques, politiques et musicales, emblématiques d’une époque. Celles-ci ne structurent pas seulement le projet comme des repères dans le temps. Dans une logique de frise historique,
elles dialoguent entre elles, à deux ou à trois voix, et des liens inattendus se tissent alors avec les éléments constitutifs d’un parcours personnel. Entre intime et politique, culture et société, le réel se réinvente sous les yeux des spectateurs, au gré des associations et des glissements de mémoire.
Dans Moto-Cross, Maud Le Pladec dialoguera entre autres avec le philosophe Miguel Abensour, elle s’interrogera sur la France des années 80 et le désenchantement d’une jeunesse politique, elle invoquera la psychanalyste Sabina Spielrein, elle mixera des morceaux emblématiques de la French Touch, elle reprendra les paroles décadentes du french boogie et expérimentera les danses urbaines de cette époque, le waacking, le locking(2), etc. Sous la forme d’un projet pop et engagé, une danse-fiction, un film pour
les oreilles.
(1) Le journalisme gonzo (en anglais gonzo journalism) est à la fois une méthode d’enquête et un style d’écriture journalistiques ne prétendant pas à l’objectivité, le journaliste étant un des protagonistes de son reportage et écrivant celui-ci à la première personne. Le terme « gonzo » aurait été employé pour la première fois en 1970 pour qualifier un article de Hunter S. Thompson, qui popularisa ce style par la suite.
(2) Le waacking est une forme afro-américaine de la danse de rue provenant des clubs homosexuels des États-Unis. Apparue dans les années 1970 à Los Angeles, s’inspirant de la musique funk et disco, c’est une danse qui se veut être une imitation de la danse sensuelle et féminine réalisée par des hommes. Le Lockin’ est un type de danse funk inventé au début des années 1970 et rattaché à la culture hip-hop.