Ce contenu contient des scènes pouvant choquer un public non averti.
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Luminous
Luminous est une recherche sur la relation pouvant exister entre les mouvements et la lumière d’une part et le son d’autre part. Comment le corps perçoit, réagit et s’adapte en fonction des différentes informations que l’œil nous communique sur l’espace et son environnement sonore ?
Ce questionnement trouve sa formulation dans le dispositif scénique de Luminous qui utilise la lumière et ses reflets, la résonance ou la réverbération du son, chaque élément agissant sur l’autre et créant un environnement hétérogène pour le récepteur, en l’occurrence le danseur.
Composé de deux parties, Luminous commence par un solo de Teshigawara qui reprend des éléments de sa précédente pièce, Light Behind Light.
C’est une immersion dans un univers sonore et lumineux qui, à partir d’une faible source, ne cesse de se multiplier et se réfléchir. Teshigawara joue sur l’ombre et la lumière et leur variation d’intensité. Les corps naissent et s’évanouissent, comme absorbés par le vide. De ce vide apparaît Stuart Jackson, danseur aveugle que Teshigawara a rencontré lors des ateliers qu’il a dirigé à Londres dans le cadre de S.T.E.P. 2000 (Saburo Teshigawara Education Project).
« Stuart Jackson avait particulièrement peur de bouger. Il ne parlait pas non plus, ou à peine. Il ne réussissait même pas à se tenir vraiment droit, ni à apprendre le braille. Il était aveugle de naissance, et toutes ses capacités restaient de côté, comme cachées. Au fur et à mesure que nous travaillions, j’ai été stupéfait de découvrir ses prépositions à danser. Bien sûr, sa technique était limitée, mais il avait l’idée de direction, d’angles, de vitesse, de tours, de sauts même, absolument fascinant. Ce garçon faisait preuve d’une liberté étonnante, comme s’il n’y avait ni droite ni gauche, ni devant ni derrière. Une danse naissait, nouvelle, avec une relation étonnamment libre entre le corps et l’espace, parce qu’échappant à toute perception visuelle. Puis le jeune homme a commencé à s’exprimer, à traduire son émotion de se sentir partie prenante de cet espace immense tout autour de lui » se souvient le chorégraphe. Par sa présence, la transition entre le visible et l’audible devient sensible. Au silence fait place une composition sonore austère, bientôt accompagnée par les mots de l’acteur Vincent Guédon. Ici, le corps est entièrement contrôlé parle son qui finit par envahir l’espace.
La deuxième partie s’ouvre sur des parois et des corps lumineux qui émergent de l’obscurité. La lumière n’est pas directe mais réfléchie par les murs et les danseurs eux-mêmes. Elle finit par se répandre petit à petit dans l’espace, créant un monde fantastique qui accentue la réalité du mouvement et sa rapidité, la lumière et le son, ces différents éléments finissant par fusionner.
Teshigawara débute son solo sur une musique de Mozart. Il n’y a désormais plus que la danse et le corps sur une scène ouverte. La lumière réduite à son minimum, met en évidence la qualité du corps et du mouvement. Stuart Jackson le rejoint. Il semble vouloir se fondre dans l’air, comme s’il déployait ses ailes pour voler. Pas de mots ou de gestes, simplement un duo créé sur la confiance et l’espace qu’ils partagent. Ici réside l’essence même de la danse de Teshigawara.
Source : Maison de la Danse – programme de salle