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Ligne de crête

Chorégraphie
Réalisation
Année de réalisation
2018
Année de création
2018

« Où en est le désir des gens ? » 1

Étouffée, noyée dans le nœud constitué des tourments de notre époque – violences  du social, déchainements du désir marchand, structures économiques et  politiques toujours plus opaques, injustices criantes, guerres, morts et  noyés, espoirs désenchantés, démissions et sensations d’impuissance,  repli sur soi et « corps dorlotés » – cette simple question invite, à  même la toile d’araignée formant obstacle, à une réflexion profonde sur  ce qui, pour chacun, présente un intérêt essentiel dans sa propre  existence, fait écran à nos désirs collectifs de transformation sociale.

Se tenir debout, pas à pas, et cheminer sur une ligne de crête entre  deux dangereux versants, violence des dysfonctionnements institutionnels  et violence des passions des hommes « tels qu’ils sont et non tels  qu’on voudrait qu’ils fussent »2,  déplier l’inclinaison à percevoir, sentir, faire et penser d’une  certaine manière, intériorisées et incorporées par chaque individu au  travers de ses affects, « renoncer à ce qu’on a appris à aimer »3.  Voilà l’effort que nous devrons mettre en œuvre pour retrouver la  capacité à nous refaire un régime de désir autre que celui qu’a instauré  patiemment le capitalisme et son rejeton infâme le néolibéralisme. Un  processus de libération.

C’est à partir de cette « étrange » combinatoire proposée par Frédéric Lordon dans son livre Capitalisme, désir et servitude, entre les passions de la philosophie de Spinoza et la philosophie politique de Marx, que prendra forme cette  nouvelle pièce. Accompagnée d’une équipe de six artistes-interprètes,  compagnons de route, je désire m’engager sur cette piste-là, piste déjà  amorcée par la dernière pièce DEUX MILLE DIX SEPT, avec l’intention de  la prendre par un autre bout, à la manière des fous d’escalades qui, s’y  reprenant avec endurance, changent radicalement les angles d’attaque,  découvrent les voies inexplorées, pour tenter de venir à bout d’un  sommet peut-être inatteignable…

Dans le Post-Scriptum qui suit le  texte de sa pièce D’un retournement l’autre, Frédéric Lordon après  avoir cité Spinoza et Bourdieu – il n’y a pas de force intrinsèque des  idées vraies – affirme que : (…) c’est l’art qui dispose  constitutivement de tous les moyens d’affecter parce qu’il s’adresse  d’abord aux corps auxquels il propose immédiatement des affections : des  images et des sons ». (…) Non pas que l’art aurait pour finalité  première de véhiculer des idées – il peut très bien, il peut surtout, se  concevoir comme production d’affections intransitives, à la manière si  l’on veut des percepts de Deleuze. Mais il peut aussi avoir envie de  dire quelque chose. Sans doute cette forme de l’art a-t-elle perdu les  faveurs dont elle a pu jouir dans la deuxième moitié du XXème siècle au  point que « l’art engagé » soit presque devenu ensoi une étiquette  risible, dont on ne voit plus que les intentions lourdement  signifiantes, les propos trop délibérés et le magistère pénible. On peut  bien avoir tous les griefs du monde pour l’art-qui-veut-dire, le  problème n’en reste pas moins entier du côté opposé : car en face de  l’art qui dit, il y a les choses en attente d’être dites. Or, elles ont  impérieusement besoin d’affections et « l’art politique » refluant, les  choses à dire menacent de rester en plan – ou bien de vivoter dans la  vitalité diminuée, dans la débilité de la pure analyse. Si elles ont  besoin d’affections, qui va les leur donner ? Et elles en ont besoin  pour devenir puissantes, c’est à dire dotées d’un pouvoir d’affecter,  condition pour entrer vraiment dans les têtes, c’est à dire en fait dans  les corps et y produire des effets ( des effets qui sont des mouvements  : accélération du rythme cardiaque, tension artérielle, agitation  colérique, éventuellement dépli des jambes, action de les mouvoir,  locomotion qui fait se rendre quelque part, participer à une réunion, entrer dans le local d’un groupe, peut-être à la fin prendre la rue).(…)  Contre les avantages inertiels de la domination tous les moyens sont  bons, tout est envisageable, cinéma, de fiction ou de documentaire,  littérature, photo, BD, installations, tous les procédés sont à  considérer pour monter des machines affectantes. Le théâtre est l’un  d’eux (…)

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1 Question, posée par Frédéric Lordon lors d’une conférence intitulée Au-delà du capitalisme ,
2 Baruch Spinoza – Traité politique
3 Conférence de Frédéric Lordon Au-delà du capitalisme

Source : Site de Ramdam

En savoir plus : https://ramdamcda.org

Chorégraphie
Réalisation
Année de réalisation
2018
Année de création
2018
Direction artistique / Conception
Maguy Marin
Lumières
Alexandre Béneteaud
Interprétation
Ulises Alvarez, Françoise Leick, Louise Mariotte, Cathy Polo, Ennio Sammarco, Marcelo Sepulveda
Production de l'œuvre vidéo
Biennale de la danse, Fabien Plasson 2018
Son
Charlie Aubry
Production de l'œuvre chorégraphique
Coproductions Biennale de la Danse de Lyon, Théâtre de la Ville – Paris, Théâtre Gérard Philipe – Centre dramatique national de Saint-Denis, La Briqueterie-CDCN du Val-de-Marne, Ville de Fontenay-sous-Bois, théâtre Garonne, scène européenne – Toulouse, ThéâtredelaCité – CDN Toulouse Occitanie, La Place de la Danse – CDCN Toulouse – Occitanie, Compagnie Maguy Marin, avec le soutien du Conseil Départemental du Val de Marne pour l’aide à la création
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