La danse du temps

« La perception du temps est au cœur de mes préoccupations. Trois fils en constituent la trame, chacun porteur de sa propre couleur : la musique du compositeur Tôn-Thât Tiêt, l’œuvre du sculpteur Andy Goldworthy et ma propre danse. »

Pour ce projet chorégraphique, conçu au seuil du troisième millénaire et inspiré par ce passage symbolique, la perception du temps est au cœur de mes préoccupations. Trois fils en constituent la trame, chacun porteur de sa propre couleur : la musique du compositeur Tôn-Thât Tiêt, l’œuvre du sculpteur Andy Goldworthy et ma propre danse.

Une image commune traverse nos démarches, celle du fleuve.

Elle a mené Tôn-Thât Tiêt à un retour au Vietnam, vers la Rivière des parfums et les chants de bateliers de son enfance.
Elle a inspiré Andy Goldworthy la rivière de limon qui servira de décor au spectacle.
Elle m’a entraînée dans son jeu de courants, placides ou tumultueux, toujours renouvelés.

Autour de ce projet, j’ai invité les chorégraphes Françoise et Dominique Dupuy, ainsi que Sophie Lessard à rejoindre le Ballet Atlantique, questionnant ainsi les générations et les filiations, mais soulignant aussi combien la danse simple qui me passionne exige des interprètes d’exception. Leur expérience, le travail d’ateliers qu’ils vont partager avec nous, leur présence sur scène sont autant d’apports essentiels à ma réflexion sur le temps du danseur, sur la façon dont un corps de danseur traverse et se fait traverser par le temps. Les outils que j’ai utilisés dans La Danse du temps sont clairs. Il y a la marche, la course, le saut, les chutes, la transe, l’immobilité, pour servir une danse généreuse, une danse première ; Un travail sur le rythme, le passage d’un état à un autre.

Ce qui m’intéresse profondément en tant que chorégraphe aujourd’hui, c’est de savoir comment passer d’une danse effrénée à une immobilité, sans mourir. De chercher comment un corps de danseur peut réaliser cette espèce de dilatation entre le temps réel et l’expérience du spectacle. C’est d’entraîner le public dans une autre perception du temps, jusqu’au vertige de ne plus savoir si ce qu’il vient de voir a duré trois heures ou une seconde. C’est cette « perte du temps » qui me fascine.

Source : Régine Chopinot