Jean Rouch
Docteur ès lettres, ingénieur civil des Ponts et Chaussées, diplômé de l’institut d’ethnologie, chargé de recherches au Centre national de la recherche scientifique, Jean Rouch effectue des recherches ethnographiques au Niger et au Sénégal à partir de 1941. En 1946, il fait la première descente du Niger en pirogue et, l’année suivante, il commence à réaliser des reportages documentaires.
Admirateur des films de Robert Flaherty, Jean Rouch donne une nouvelle impulsion au cinéma ethnographique en filmant avec une caméra 16 mm des faits sociaux précis. Son « Initiation à la danse des possédés » (1948) est remarquée dans des festivals, et les films qui vont suivre connaissent souvent une exploitation commerciale. Jean Rouch n’est pas seulement un homme d’étude. Son mérite est de joindre à ses observations anthropologiques un bagage technique et une méthode d’approche de plus en plus personnelle. En effet, il est son propre opérateur, enregistre les événements dans leur continuité – sans couper les très longs plans séquences – et tourne au coeur de l’action, la caméra à la main. « Les Maîtres fous » (1954), extraordinaire document sur les rites de possession de la secte des Haoukas au Niger, est à cet égard la référence du cinéma selon Jean Rouch. Le film, critiqué pour sa minutie d’entomologiste, déclenche la controverse. Il se justifie par l’emploi d’un ton direct et improvisé, et par un commentaire explicatif visant à la précision et à l’objectivité. Afin de désamorcer les critiques, le cinéaste déploie un regard dans toutes les directions avec « La Pyramide humaine » (1959), où, au lycée d’Abidjan, les Blancs sont autant observés que les Noirs, et avec « Petit à petit » (1970), où il soumet les Parisiens au regard d’un Nigérien.
Ce faisant, Jean Rouch développe un cinéma plus subjectif, comme en témoigne son entreprise majeure, « Chronique d’un été » (1960), en collaboration avec Edgar Morin, une enquête sociologique dans le Paris de l’été 1960, et ses essais de » cinéma vérité » aux limites de la fiction comme « La Punition » (1960) et « Gare du Nord » (1964, sketch de Paris vu par). Par la suite, l’Afrique demeure son sujet de prédilection, qu’elle soit traditionnelle ou soumise à l’influence néocoloniale. Si son humanisme dénué de toute idéologie emporte toujours la sympathie, Jean Rouch ne retrouve pas le souffle des Maîtres fous.
Source : Ciné-ressources
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