Rudolf Noureev
D’ascendance tartare, Rudolf Noureev passe son enfance à Ufa (Bachkirie) où il pratique la danse folklorique. Bravant l’autorité paternelle, il entre à l’école Vaganova de Leningrad et trouve en A. I. Pouchkine le professeur idéal. Après trois années de travail intensif, il débute sur la scène du Kirov et devient soliste. En 1961, lors d’une tournée du Kirov en France, il danse à Paris, laissant le public ébloui et, au moment de repartir, il demande l’asile politique. Il est aussitôt engagé dans le Ballet du marquis de Cuevas et triomphe dans La Belle au bois dormant. Invité à Londres par M. Fonteyn pour participer à un gala de charité, il noue une liaison artistique avec l’étoile britannique. Le couple entre dans la légende et forme en scène, selon Noureev, « un seul corps, une seule âme » dans Giselle, Le Lac des Cygnes ou dans Marguerite et Armand, créé pour eux par F. Ashton en 1963. Avide de découvertes, il danse partout dans le monde et il faut attendre 1983 pour qu’il se fixe dans une compagnie, celle de l’Opéra de Paris, où il devient directeur de la danse. Après vingt-huit ans d’exil, il revient en Russie pour danser sur la scène du Kirov en 1989. La même année, confronté à des conflits administratifs, il quitte l’Opéra, mais reste le chorégraphe principal.
Noureev est, avec V. Nijinski, une des figures mythiques de la danse du XXe siècle. Sa beauté, son visage expressif, sa technique conquise à force de travail, ses sauts silencieux en ont fait le prince classique idéal. Admirateur fou de l’œuvre de M. Petipa, il remonte tous ses ballets. Son sens précis de la mise en scène lui fait aborder la relecture des œuvres en homme de théâtre. Le chorégraphe développe les parties dansées dites de caractère et étoffe les variations des interprètes masculins. Raymonda qu’il monte dès 1964 au Royal Ballet est le premier ballet qu’il met à l’affiche de l’Opéra de Paris en 1983. Suivent Le Lac des Cygnes (1964, Op. de Vienne ; 1984, Op. de Paris), La Belle au Bois dormant (1966, la Scala ; 1989, Op. de Paris), Don Quichotte (1966, Op. de Vienne ; 1981, Op. de Paris), Casse-Noisette (1967, B. royal suédois ; 1985, Op. de Paris), La Bayadère, dont il présente l’acte des Ombres en 1974 à l’Opéra de Paris et sa version intégrale en 1992, quelques mois avant sa mort.
Alors qu’il est une star classique adulée du public, sa curiosité insatiable le pousse à explorer tous les styles : Ashton, R. Van Dantzig, R. Petit, M. Béjart, G. Balanchine, G. Tetley ou M. Graham qui lui fait danser Lucifer (1975). Cette ouverture guide aussi son action à l’Opéra de Paris. Il invite T. Tharp, M. Marin, M. Cunningham, J. Kylián, Mark Morris, W. Forsythe et redonne vie au ballet baroque avec Bach-Suite et Quelques Pas graves de Baptiste de F. Lancelot en 1984. Il met en avant les plus talentueux des jeunes danseurs : L. Hilaire, M. Legris, I. Guérin, S. Guillem. En six années, Noureev porte le ballet de l’Opéra de Paris à un des sommets de son histoire.
Source : Martine Planells, Dictionnaire de la danse, sous la direction de Philippe Le Moal, Larousse, 2008
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