Nawal Lagraa - Aït Benalla
Née à Safi au Maroc, d’un père berbère et d’une mère française, Nawal Aït Benalla s’installe en France avec ses parents, à l’âge de huit ans. Plutôt garçon manqué, elle se frotte à la danse classique, par hasard. Cela agit sur elle comme un révélateur. Elle trouve sa façon d’être au monde, un moyen de s’ancrer, de trouver une colonne vertébrale.
Prête pour d’autres horizons, Nawal fait le choix de déménager à Paris à 19 ans, où elle s’ouvre au jazz et à la danse contemporaine. Elle intègre l’Armstrong Jazz Ballet, où elle travaille avec les chorégraphes Matt Mattox, Georges Momboye, Wayne Barbaste. Puis part en tournée mondiale entre 2000 et 2001 avec le DJ Laurent Garnier et vit une expérience inouïe, se retrouvant sur les plus grandes scènes de musique électronique face à des milliers de spectateurs à Berlin, Paris, Reykjavik…
Artiste ouverte à diverses formes d’expériences, elle participe en tant que danseuse et comédienne à « Cyrano de Bergerac » de Jacques Weber (2001) et « Les Troyens » de Yannis Kokkos (2003) au Théâtre du Châtelet.
En 2003, elle rencontre Peter Goss et suit de manière intensive ses cours de danse contemporaine et de yoga. Précision, recherche et analyse du mouvement, le chemin qu’elle empreinte alors, l’emmène vite vers la question des études visant à la transmission. Elle obtient en 2005 le Diplôme d’État de professeur de danse au CND de Pantin, Paris. Nawal Aït Benalla sait désormais que sa juste place est au sein de la création chorégraphique contemporaine.
Rencontre et Baraka à deux
En 2006, elle passe parmi 750 candidates une audition d’une semaine, pour Matri(K)is, création d’Abou Lagraa. Elle intègre La Baraka d’abord comme danseuse. Rapidement, elle devient assistante à la chorégraphie sur de nombreuses pièces de La Baraka notamment à Tunis pour le Centre Méditerranéen de Danse Contemporaine, ou pour le Memphis Ballet (USA). En 2009, ils participent ensemble à la cérémonie de clôture du Festival Panafricain à Alger.
En 2008, Abou Lagraa crée avec Nawal à la Biennale de la Danse de Lyon, le duo D’Eux Sens, pièce sur les poèmes d’Omar Khayyām, avec laquelle ils parcourent ensemble toute l’Europe jusqu’en 2011.
Sous l’impulsion de Nawal, le couple va faire un aller-retour vers leurs origines de l’autre côté de la Méditerranée. Elle prend la direction pédagogique de l’aventure de la création du premier Ballet Contemporain d’Alger, de 2010 à 2015, avec neuf danseurs hip-hop autodidactes.
Tout en poursuivant son travail pédagogique lors des tournées du Ballet Contemporain d’Alger, elle partage son goût de la transmission lors de master-class, en France, aux Pays-Bas, en Espagne, en Pologne, en Russie, aux États-Unis…
Une femme devant et derrière la scène
Comme une suite au projet Algérien, Nawal crée en 2014 un projet de création et de formation pour sept femmes, cette fois-ci, danseuses autodidactes, issues des quartiers de l’agglomération lyonnaise, Femmes sur le devant de la Scène.
Cela donne Do You Be, un dytique avec un solo de Nawal qui révèle une très belle danseuse qui semble se libérer de son passé. Dans une seconde partie, elle laisse la place aux sept danseuses lauréates du programme Femmes sur le devant de la scène.
Dans cette pièce de groupe, seuls les gestes et les visages des interprètes, dépositaires des sédiments d’un quotidien parfois éprouvant, témoignent de la réalité sociale. C’est sur ces traces-là que rebondissent les désirs de liberté.
Si l’aventure de La Baraka à deux a commencé par une audition dès 2006, elle prend tout son sens quand en 2014, Nawal et Abou Lagraa écrivent le projet d’un lieu de résidence pour La Baraka et des compagnies invitées. Le lieu se matérialise dans la Chapelle Sainte-Marie désacralisée à Annonay une sorte de « Villa Médicis » pour la danse en Ardèche… Nawal et Abou Lagraa s’installent dans cet espace rénové où ils décident, ensemble, de codiriger La Baraka et le Studio Chorégraphique Chapelle Sainte-Marie.
Elle y dirige, entre autres des projets d’inclusion et de solidarité par la danse, défendant l’idée que l’art et l’engagement social sont indéfectiblement liés. En 2018, Nawal & Abou et Les Fondations Edmond de Rothschild élaborent le programme Premier(s) Pas qui propose un accompagnement sur-mesure à 360° destiné à des danseurs·ses professionnel·le·s. Il alterne sessions de créations, de formations et de tournées. La formation propose, entre autres, du coaching en entreprenariat et en communication.
En 2020, la chorégraphe répond à la commande du DNSP danse Jazz Paris-Boulogne-Billancourt et crée Ailleurspour les étudiants de 3ème année.
La même année, elle signe la chorégraphie du volet 1 du spectacle Premier(s) Pas, première mondiale au Festival Suresnes Cités Danse. On retrouve un travail d’ancrage au sol, de libération progressive et d’élévation des corps vers leur individualité. Une grande attention à la personnalité de chaque danseur·se. Nawal agit comme un révélateur. Sa danse a quelque chose de plus brut, sauvage, plus engagée socialement, comme quelque chose à exorciser.