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LES QUATRE SAISONS
1ère partie : TEMPO
Note d’intention
« Le temps qui vole souvent comme un oiseau se traîne d’autres fois comme une tortue ; mais il ne semble jamais plus agréable que lorsque l’on ne sait pas si il va vite ou lentement. »
Ivan Tourgueniev
A l’instar de Chaplin, qui dans son film Les Temps modernes, montre l’absurdité et la folie de presser les cadences, je joue avec celles des mouvements des concertos de Vivaldi et de Bach : allegro, largo, adagio non molto, presto, larghetto… Face au mouvement immuable de l’horloge, ceux des danseurs rythment le temps, le décomposent, se démultiplient, ralentissent, selon des cadences infernales ou d’autres qui s’étirent.
Dans le bruit du monde, j’écoute le souffle que les musiques m’envoient, leurs battements de coeur, leurs pulsations de vie.
Toute notre vie parle du temps. Anciens temps, temps futurs, temps modernes, temps immémoriaux, temps des conjugaisons : futur antérieur, passé simple, passé-composé, présent du subjonctif… Plus d’un écolier s’y est cassé les dents ! On dit que les enfants n’ont pas la notion du temps. Estce bien vrai ? N’est-ce pas nous, adultes, qui courons après le temps, voulons en gagner, avons peur d’en perdre, alors que finalement nous voudrions le prendre, nous en donner, le voler, l’arrêter… ?
Le philosophe Héraclite disait « le temps est un enfant qui joue ». On sait toutes et tous que pendant le jeu d’un enfant le temps n’existe plus.
Comment retrouver cette présence au présent ? Comment ne pas laisser le tourbillon de nos vanités nous en faire perdre la notion ?
Cette création baroque, sans y répondre vraiment, nous renvoie à des perceptions intimes de notre propre relation au temps.
Marie Geneviève Massé
1ère partie : Tempo
Les gestes répétitifs et continus, la vague d’un « pas grave », la simplicité du « coupé », le tic-tac du « rond du coude » affirment la notion de durée et de mouvement perpétuel. L’évolution précise et inexorable des mouvements évoque notre relation à l’éternité.
Côte à côte, en duo ou dans un trio, les corps portent des regards légers, font et défont l’espace entre éternité et éphémère, entre partage et transmission d’âge en âge.
Dans les allegros, rien n’a le temps de s’installer. Les phrases musicales s’enchevêtrent, se fondent les unes dans les autres, se prolongent indéfiniment comme une longue route dont on ne voit pas le bout. Les phrases chorégraphiques fabriquent l’espace qui se défait au fur et à mesure. Les danseurs forment, déforment, transforment inlassablement, tressent des figures à l’infini. Ils s’essoufflent, s’usent, se perdent, s’emberlificotent, tombent. Quelques moments de répit, ils se relèvent et courent de plus belle. Chacun sur son chemin se presse. Martellement des « contretemps », tourbillon des « pas de passacaille », déséquilibre des « pas tombés », nous sommes au coeur de l’éphémère, entraînés dans le bourdonnement incessant de la boulimie d’agir.
Largo : Installation du temps
Allegro : boulimie d’agir
Largo : les trois âges
Allegro : garden party
Adagio : mère et fille
Allegro : ivresse de danser
Largo : fuite du temps
2ème partie : Les Quatre Saisons
Prisonniers du temps, nous en avons tous une perception différente :
Selon les cultures : Le Printemps
Trois groupes aux couleurs et corporalités différentes rythment le temps et l’espace, chacun à leur manière : les uns sur le mode lent, d’autres en accélération constante, certains par la marche simple. Ils vont de découvertes insolites en rencontres inattendues vers des échanges jubilatoires et créatifs.
Allegro : différences
Largo : rencontre
Allegro : partages
Selon l’état d’âme : L’Eté
En temps normal nous voyons 24 images par secondes ; même cela est relatif. Et ce temps indomptable peut devenir poésie ou cauchemar.
Allegro non molto : attendre
Adagio-presto : tomber en amour
Presto : danger
Selon les âges : L’Automne
L’enfant est tout au présent ; ludique et multicolore. Puis progressivement, comme des voiles, les brumes de l’âge le submergent. Enfin, le temps s’accélère et il pirouette un pied de nez à la mort.
Allegro : présent d’enfance
Adagio-molto : ombres du passé
Allegro : les petits bonhommes et la mort
Face à l’éternité : L’Hiver
Course contre le temps pour se hâter de fabriquer, de construire, de transmettre. Urgence et vanité de dominer le temps. S’activer pour laisser des traces… qui ne fondraient pas comme neige au soleil…
Allegro non molto : rattraper le temps
Largo : traces
Allegro : vanité
Musique
Bach et Vivaldi ne se sont jamais rencontrés. Pourtant, après avoir découvert certaines éditions de concertos de Vivaldi, Bach lui-même
utilise cette forme de musique concertante dans laquelle le lyrisme et l’inépuisable vitalité rythmique dégagent une saisissante relation au temps, à la pulsation.
1ère partie : Tempo
Vivaldi : largo du concerto pour flûte en do majeur, RV 444
Bach : allegro du concerto pour violon en ré mineur, BWV 1052
Vivaldi : largo du concerto pour flûte en do majeur, RV 443
Bach : allegro du concerto pour violon en la mineur, BWV 1041
Vivaldi : adagio du concerto pour violoncelle en si mineur, RV 424
Bach : allegro assai du concerto pour violon en la mineur, BWV 1041
Vivaldi: largo du concerto pour flûte en do majeur, RV 444
2ème partie : Les Quatre Saisons
Le Printemps , concerto en mi-majeur RV 269 : Allegro, Largo, Allegro
L’Été, concerto en sol mineur RV 315 : Allegro non molto, Adagio-presto, Presto
L’Automne, concerto en fa majeur RV 293 : Allegro, Adagio-molto, Allegro
L’Hiver, concerto en fa mineur RV 297 : Allegro non molto, Largo, Allegro
Interprétations sur musiques enregistrées :
1ère partie : les pièces de Vivaldi sont interprétées par l’ensemble Amarillis avec Ophélie et Héloïse Gaillard, et les pièces de Bach par
Amsterdamse Bach Solisten, violon et direction Thomas Zehetmair
2ème partie : Les 4 Saisons sont interprétées par La Camerata Bern, violon et direction Thomas Zehetmair