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Mauvais Genre

Chorégraphie
Réalisation
Année de réalisation
2004
Année de création
2003

Comment d’une pièce à caractère autobiographique – Good Boy – déplier des histoires plus génériques, tel a été le pari de Good for…, pièce pour quatre danseurs. Tel est le défi aujourd’hui avec Mauvais Genre. Une nouvelle version, mais cette fois, pour vingt à trente personnes, dont une majorité a par ailleurs son propre parcours de création.

Étrange infinité du solo : s’il a en effet une grande capacité à exposer le corps plus que n’importe quelle forme, il semble, en même temps, inséparable de son interprète. Un autre corps, des corps autres : peut-on dire encore qu’il s’agit du même solo ? Je voulais voir ce que donneraient, transposées à d’autres corps, chacun porteur d’une histoire individuelle, les propositions de ce premier travail.

Si Good Boy trafique avec la maladie et la fragilité de notre corps, il s’agit bien d’une exposition d’un corps singulier dont les strates respirent et transpirent sa propre histoire. Pour autant, il ne s’agit pas ici d’autobiographie déguisée, encore moins de biographies démultipliées. En s’appuyant sur les différences de chacun, Good for… déplace l’enjeu politique et social du solo initial vers la question de la communauté et de sa difficile figuration. Démultiplier les présences produit autant de pistes pour représenter les enjeux chorégraphiques et sociaux de Good Boy. Pour autant : c’est moins une communauté indivise qui apparaît, réconciliée ou non, qu’une démultiplication des singularités.

Les présences de Matthieu Doze, Rachid Ouramdane et Christian Rizzo dans la deuxième étape piégeaient le dispositif du solo, en ce qu’elles en défiguraient chacune des séquences qui constituaient le matériau initial. Quelque chose de l’identification du danseur au solo et du solo au danseur s’y trouve ainsi empêché. D’une expérience particulière peuvent surgir des tralalas. Good Boy se risquait au tragique, lui aura substitué sans que cela ait été intentionnel un parti pris ludique, ironique, amusé à tout le moins. On peut dire que l’on passe du corps-je au corps-jeu. La nécessité du contrepoint produit par chacun ayant incliné l’ensemble du projet dans le sens d’une complicité amusée.

Nous avons, lors de notre première présentation de Good for… au Crestet-centre d’art, établi un rapport de plasticité et d’élasticité spécifique, dû à l’architecture du lieu. L’espace en L des galeries d’exposition où nous dansions et les baies vitrées, ou plutôt les vitrines qui nous séparaient du public debout dans le jardin carré renforçaient la distance et la séparation entre le spectateur et les interprètes, l’obligeant ainsi à assumer le choix qu’il avait fait de regarder tel ou tel d’entre nous. L’espace permettait un jeu du visible et du non-visible, une démultiplication et une réduction de nos présences. Ce dispositif dans le White Cube favorisait également une certaine distanciation de l’objet traité. Nous avons exposé cette proposition à l’auditorium de Dijon – un très grand théâtre –, et nous avons constaté la grande diversité de lectures rendues possibles par ce nouvel espace architectural, très diffèrent du précèdent. Sans que cela fût prémédité, il y eut un retour au tragique propre à la première version.

Avec Mauvais Genre, le nombre de personnes aura nécessairement pour effet de déplier et démultiplier les lignes de tension du solo initial ; mais l’enjeu pour moi, c’est aussi de travailler à partir des possibles architectoniques des sites où sera présentée la pièce afin de tisser d’autres grilles de lecture, de multiplier les regards sur cette histoire.

Explorer d’autres possibles dans les espaces de représentation où nous nous produisons suppose un travail en amont. Cela nous oblige à repenser les composants de la pièce initiale comme une nouvelle étape, pour mieux désamorcer ce qui a été construit pendant la précédente. Je pourrais dire aussi qu’un artiste fait toujours la même pièce, j’assume ici et revendique ce doux et lent travail de grattage, de biffures, de retour et d’après-coup qui peut-être disent tous la même obsession, mais sans en empêcher l’altération et les variations.

Avec Mauvais Genre, l’enjeu est encore différent puisque nous sommes des good girls et des good boys réunis. Nous mettons l’accent sur la production sonore de nos corps : des splash et des boum. Et sur la capacité à chacun de se rendre poreux à sa propre féminité et sa propre masculinité : des talons pour les boys oui, mais pas de falbalas, des slips kangourous pour les girls oui, mais sans dentelles.

Les bons garçons sont devenus des mauvaises filles, et réciproquement. Les bonnes filles vont au paradis, les mauvais vont partout.

Et font pas de chichis.

Alain Buffard [novembre 2002] 

Chorégraphie
Réalisation
Année de réalisation
2004
Année de création
2003
Direction artistique / Conception
Alain Buffard
Interprétation
Jérôme Andrieu, Cédric Andrieux, Trisha Bauman, Jeanne-Nora Bennouar, Nadia Beugré, Alain Buffard, John Bateman, Rita Cioffi, Régine Chopinot, Germana Civera, Steven Cohen, Erin Cornell, Georgette Dee, Ingo Diehl, Herman Diephuis, Evie Demetriou, DD Dorvillier, Matthieu Doze, Elu, Héla Fattoumi, Nicolas Fayol, Mitia Fedotenko, Virginie Garcia, Neil Greenberg, Miguel Gutierrez, Trajal Harrell, Simon Hecquet, Boris Hennion, Matthieu Hocquemiller, Ishmael Houston-Jones, Christophe Ives, John Jasperse, Krassen Krastev, Heather Kravas, Hanna Hedman, Jennifer Lacey, Anne Laurent, Xavier Le Roy, Romuald Luydlin, Magali Milian, Vera Mantero, Mathilde Monnier, Bernardo Montet, Sarah Jane Morris, Julie Nioche, Michael O’Connor, Hildur Ottarsdottir, Rachid Ouramdane, Pascale Paoli, Mickaël Phelippeau, Laurent Pichaud, Cécile Proust, Fabrice Ramalingom, Laurence Rondoni, Sylvia Scheidl, Claire Servant, Lucy Sexton, Mark Tompkins, Claudia Triozzi, Tomeo Vergès, Jeremy Wade, Daniela Weber
Production de l'œuvre chorégraphique
Création le 26 juin 2003, festival Montpellier Danse (annulé)
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