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Contemporain - Epreuves de danse 2019. Variation N°9. Fin du 2ème cycle examen d'entrée en CEPI. Garçon.
Commentaire pédagogique
Matrices de la composition :
Les matrices intrinsèques de cette proposition chorégraphique sont l’élan, l’impulsion, la retenue, la spirale, la fluidité, le lier, l’élasticité et la prise d’espace. Cette composition s’organise également autour des notions de stabilité et de labilité (propension du danseur à changer, à bouger et à être mobile).
Globalement, la variation fonctionne par un jeu d’affinités entre les différents facteurs du mouvement. Lorsque le temps est soudain, l’espace est direct et le flux est contraint. Lorsque le temps est continu et soutenu, l’espace est alors flexible et courbe avec un flux libre.
Au sein de cette proposition, la qualité dynamique crée la forme. Cette qualité globale est mise en tension par certains moments au sein desquels les intentions sont davantage spatiales : les surfaces du corps créent alors la forme, des volumes et lignes sont créés par le danseur (tilt seconde, grand plié…).
Afin de nourrir la poétique du mouvement, nous pouvons emprunter l’image d’un roseau mis en mouvement par le vent. Le roseau est emporté, se courbe, flotte, suspend… Il est extrêmement souple tout en étant résistant et puissant. Ces propriétés renvoient au principe de labilité.
L’élément de l’air est également très présent. Nous pouvons imaginer le danseur dans un « océan d’air ». Il met en « mouvement l’air » et « l’air le met en mouvement ». Nous mettons en jeu le principe de réversibilité du toucher : toucher et être touché.
L’élément de l’eau peut également nourrir l’imaginaire du danseur : le flux et reflux de la mer, l’écoulement paisible d’une rivière en montagne… Des représentations picturales telles La Grande Vague de Kanagawa de l’artiste Hokusai sont des supports permettant l’incorporation de cette composition.
Analyse fonctionnelle de la composition :
De manière générale, les initiations du mouvement se situent au niveau de la colonne vertébrale, de la tête, de la ceinture scapulaire et de la cage thoracique.
En restant mobile, la ceinture scapulaire (ceinture de l’expression) permettra le caractère lyrique et expressif de cette variation, proche en cela de certaines caractéristiques de la danse de Doris Humphrey.
Les élévations de jambes sont généralement initiées par le buste en situation de contrepoids.
La plupart des déséquilibres trouvent leur source au niveau de la tête.
L’élan des bras permet l’amplitude des grands sauts.
Les courses permettent de grandes prises d’espace. Pour celles-ci, il est essentiel d’engager le sacrum, d’attaquer le sol par la pulpe des doigts de pieds, d’orienter le poids du coccyx-sacrum vers le sol et la tête vers le ciel. Il est également important lors des grandes courses circulaires que le danseur abaisse son centre de gravité et laisse « passer les jambes » afin de rester stable. Les courses et les suspensions sont prises dans des élans favorisant une circulation constante du mouvement. Les suspensions doivent être envisagées avec l’idée d’une prise de risque et non celle d’un « équilibre statique ». Notons que la notion d’élan, très présente au sein de cette composition, permet au danseur d’obtenir une certaine organicité et d’aborder certains enjeux techniques en toute sérénité.
Concernant la marche effectuée en début de variation, le danseur privilégie un « aller vers » de manière continue à vitesse constante. L’intention de pénétrer l’espace est essentielle et le regard est direct. Il convient d’être vigilant à ce que la marche ne comporte pas d’accentuations mais soit fluide. Cette marche est initiée par un léger déséquilibre avant. Afin de bien engager ce dernier, il est souhaitable que le danseur soit en position « pied à la marche » au démarrage afin d’entrer de manière dynamique dans l’espace.
Au moment de la suspension précédant la partie au sol, le danseur doit aborder la spirale descendante en se lançant dans l’espace avec l’idée que le bas du corps attire le haut et non l’inverse. La descente au sol doit être envisagée de manière dynamique et non formelle.
Pour la partie au sol, le danseur doit suspendre le bassin et ouvrir le sternum dans la suspension précédent la 4ème au sol. Après le temps de silence, le danseur doit effectuer un seul et même mouvement pour se retrouver sur ses deux ischions. Pour cela, le danseur doit trouver une impulsion dans les mains pour repousser le sol et tracer un quart de cercle avec les pieds. La torsion suivante s’engage par la tête puis la cage thoracique avec un retard de l’engagement du bassin. Le danseur doit veiller à balayer l’espace avec le regard. Le mouvement suivant s’effectue avec une dynamique de swing dans le sol et une décélération lorsque le bassin va vers la suspension.
Lors du déséquilibre arrière (de profil, après le déroulé de colonne), l’initiation du mouvement s’effectue par la cage thoracique et le sternum. Nous pouvons imaginer la cage glissant sur les poumons. Cela évitera au danseur de « casser » la nuque et donc d’écraser les cervicales dans ce déséquilibre arrière.
Enfin, concernant les déplacements sinusoïdaux et les suspensions spiralées situés en fin de variation, le danseur doit dessiner des demi-cercles au sol. Il est essentiel de décélérer et d’accepter le poids pour engager le déplacement. L’interprète doit également veiller à gérer les distances au sein de ce parcours de fin. Concernant les spirales amenant les déséquilibres, il est important que ce mouvement s’inscrive dans les trois plans (sagittal, transversal et frontal). Ces mouvements s’effectuent dans un flux continu et non dans une dynamique de swing. Enfin, le danseur doit être vigilant à ne pas donner à voir au spectateur les accélérations et décélérations.
Relation musique et danse :
Contrairement au travail d’écriture chorégraphique, la composition musicale ne contient ni impact ni arrêt. Cela permet un espace de dialogue entre la danse et la musique. Généralement, les respirations musicales accompagnent celles du danseur. Les 3 niveaux de relation entre musique et danse sont développés : rapport analogique, rapport distancié et rapport frotté.
Cette variation ne proposant pas un temps spécifique d’improvisation, nous faisons le choix de permettre au danseur d’organiser sa ponctuation (suspensions, points d’orgue, accélérations…) à l’intérieur de l’œuvre musicale et de son phrasé. Cela lui offre la possibilité de faire dialoguer sa musicalité intrinsèque avec celle de la composition musicale. Cependant, certains temps – notamment au niveau des accentuations – sont des points de rencontre stabilisés entre musique et danse et permettent une densité rythmique. Par exemple, les 8 temps de silence au sol représentent un moment de cristallisation dans la construction de la composition. Il est essentiel que le danseur habite ce temps en contraste avec la musique. Dans cette situation, le danseur reste connecté au mouvement qui a précédé et est prêt à bondir dans celui qui succède. L’arrêt est net, soudain et s’effectue par un mouvement direct, sans résonnance et sans rebond.
La proposition musicale s’organise autour de la notion de fluidité : une fin de phrase est le début d’une autre, la fin d’une suspension est déjà le début du déséquilibre. Cette idée de tuilage est essentielle.
Séquençage :
– Au début de la composition, le son naît du silence et le mouvement de l’immobilité ;
8 temps de marche à la noire (80 environ) puis 8 temps de course à la croche et 4 temps de retour au calme (dont deux derniers temps de levée au piano annonçant le « pas de six ») ;
– 4 phrases de 6 temps et une de 10 temps (se terminant en course) ;
– 8 temps en ternaire pour la partie de grands sauts (accents musicaux et danseur sur 1/3/7) ;
– 2 phrases de 8 temps avec chacune un appui sur le 1er temps ;
– 1 phrase de 8 temps avec accents musicaux et danseur sur 7/8 (bras puis tête) ;
– 2 phrases de 8 : la 2ème avec decelerando et accents danseur sur 1 (bras) /7 (mains) ;
4 phrases de 8 (avec accompagnement voix) ;
– 5 phrases de 8 :
• 2ème phrase → accent danseur sur 8 (impact au sol)
• 3ème phrase → silence danseur
• 4ème phrase → accents musicaux et impulsions danseur sur 1/3/5/8
5ème phrase → accents musicaux et danseur 2/5 (impulsion sur appui main) puis déroulé de la colonne sur 7 et 8 (chimes) ;
4 phrases de 8 avec pour la 1ère impacts danseur sur 4/et/5.
Quelques pistes de travail :
Il est essentiel de ne pas aborder cette danse avec une vision techniciste et formelle. Il peut être utile de travailler autour des chemins du mouvement, du tracé et du dessin dans l’espace. L’ensemble de ces chemins peut, dans un premier temps, être abordé par un travail autour de l’esquisse ou encore autour des trajets dans l’espace avant de fixer davantage la forme.
Des thèmes d’improvisation/composition peuvent être proposés afin de permettre l’appropriation des éléments fondamentaux de cette danse (liste non exhaustive) :
• Soudain/continu
• Espace direct/indirect
• Impulse/impact
• Spirale dans l’espace et le corps
• Qualités dynamiques créant la forme/qualités spatiales (les surfaces créent la forme, création de volumes…)
• Stabilité/labilité
• Équilibre/déséquilibre
• Éléments : air, eau…
De nombreuses adaptations sont possibles, selon le degré de pratique de l’élève interprète afin de ne pas le mettre en difficulté. Il est important de favoriser une transmission matricielle afin de dépasser les difficultés techniques. Cela permettra au danseur un travail d’appropriation dégagé d’une reproduction formelle. À ce titre, sur le plan de la culture chorégraphique, il peut être intéressant d’observer dans l’œuvre Trois générations de Jean-Claude Gallotta comment chaque génération d’interprètes se saisit et s’approprie l’écriture sans en perdre les matrices intrinsèques ni les intentions. Sébastien THIERRY
Cette variation écrite pour un garçon peut cependant être dansée par une fille si elle en est motivée.
Livret pédagogique