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Blowin'

Année de réalisation
2007
Année de création
2007

Dans cette pièce pour 8 danseurs et 2 musiciens, Catherine Diverrès explore la relation de la danse avec la musique, en privilégiant l’improvisation afin de donner « la priorité à l’instant et à l’interprète »

« Blowin’ » est créé en mai 2007 à la MC93 de Bobigny dans le cadre des Rencontres chorégraphiques de Seine Saint-Denis. Dans cette pièce pour 8 danseurs et 2 musiciens, Catherine Diverrès explore la relation de la danse avec la musique, en privilégiant l’improvisation qui « donne la priorité à l’instant et à l’interprète » (document de diffusion du Triangle, 22-23 novembre 2007), plutôt qu’à l’écriture et à la composition. La musique jouée sur scène par le percussionniste Seijiro Murayama et le saxophoniste Jean-Luc Guionnet interagit en direct avec la danse partageant le même espace.

En réponse à une journaliste, Catherine Diverrès revient sur titre de la pièce et l’image du pissenlit en illustration du programme et en livre les clefs : « Un jour où je disais : “je ne suis pas dans le vent”, Laurent Peduzzi, le scénographe, s’est mis à chanter une chanson de Bob Dylan, “Blowin’ in the wind” – la vérité n’est-elle pas transportée par le vent ? – une chanson politique. Blowin’, le souffle, essentiel pour nous danseurs. L’image du pissenlit  est liée, tout le monde a soufflé sur un pissenlit. La beauté de cette espèce d’arborescence de fines tiges représente pour moi le travail du plateau, toute une équipe au travail, ce que je revendique très fort. » (C. Diverrès, dans B. Bonis, « Je suis une femme d’écriture », Danser, mai 2007, n° 265, p. 19)

Fortement inspiré par l’ancestral Yi King, le Livre des mutations que la chorégraphe confie lire depuis trente ans, « Blowin’ » est imprégné de l’esprit asiatique dont elle a cherché à s’inspirer lors d’un projet de résidence en Chine resté sans suite, et remis ici à profit. Cette pièce, explique la chorégraphe est « un événement orienté, balisé, mais qui chaque fois prendra des directions différentes dans l’organisation des durées et des articulations ».

Au-delà de la relation entre musiciens et danseurs, c’est en effet l’ensemble des relations impliquées dans la forme chorégraphique qui est remise en jeu : la durée des thèmes, la relation au public, sa place dans l’espace et jusqu’au choix des thèmes traités, laissé au programmateur. « C’est au terme de ces décisions et de ces hasards que la construction émerge, la possibilité d’une totalité organique…» précise le programme qui accompagne la création de la pièce (programme des Rencontres chorégraphiques de Seine St Denis, 12-13 mai 2007).

Audace ludique de « Blowin », il revient en effet à chacun des programmateurs de choisir trois éléments parmi six principes d’improvisation proposés pour leur effet sur l’interprétation dépouillé de toute psychologie ou approche littéraire : unité, opposition, accumulation, transformation, terre (kun), ciel (quian). « Chaque principe engage une organisation spatiale et un mode de composition singulier, qui mobilise un nouvel apprentissage », précise la chorégraphe, « il faut apprendre à voir, à déchiffrer, à se situer, à se transformer – à perdre, à trouver une place dans le groupe. Corps à corps, mouvements de meute, instants de solitude dessinent des figures abstraites traversées de moments rituels, quotidiens ou imaginaires. Scandant ces lignes, le saxophoniste et le batteur se déplacent, ils voyagent dans l’espace et la matière sonore, passant de l’énergie extatique à la méditation. » Combinés au choix de trois de ces principes, trois figure écrites par les danseurs et Catherine Diverrès explorent le grotesque, le lyrisme, Eros, la nostalgie. La proposition retenue pour la représentation que le film montre  fait ainsi alterner les éléments suivants : lyrisme (figure), transformation (principe), nostalgie (figure), unité (principe), grotesque (figure), accumulation (principe), Eros (figure), terre (principe), grotesque (figure), opposition (principe), lyrisme (figure).

Aux yeux d’I. Filiberti, en « incluant programmateurs et public dans ses déterminations », « Blowin’ pousse la notion de choix propre à l’improvisation jusqu’à sa dimension politique » (I. Filiberti, Catherine Diverrès, mémoires passantes. Paris : Centre national de la danse ; L’Oeil d’or, 2010, p. 92). Pour Catherine Diverrès, c’est en effet une manière d’investir chacun un peu plus dans le processus d’élaboration et de réception d’un spectacle : « improvisation, aléatoire responsabilisent les interprètes et les programmateurs » (C. Diverrès, dans B. Bonis, « Je suis une femme d’écriture », Danser, mai 2007, n° 265, p. 19).

Faute de budget, la scénographie imaginée par Laurent Peduzzi se veut économe : les interprètes évoluent sur un plateau simplement éclairé par des ampoules nues comme le reste de la salle dans un souci d’unification. Une partie du public est disposée sur la scène elle-même selon un schéma laissé à l’appréciation du programmateur à l’exclusion de la frontalité et de la bi-frontalité.

Cette création est aussi une mise à l’épreuve de l’improvisation comme mode de composition, pour Catherine Diverrès qui s’est très tôt positionnée comme une femme d’écriture en réaction à l’emprise américaine des années 1980. Présentée comme une remise en jeu radicale du langage et de l’écriture de la chorégraphe, la pièce « éclate, disperse, et déstructure les fondamentaux, pour les réengager sous d’autres angles, en sonder les forces et les failles, les confronter à d’autres enjeux et possibilités » (I. Filiberti, « Blowin ou l’écriture en question », Les cahiers du CCNRB, 2007, n° 1, p. 6-7) : « J’ai commencé par me demander comment je pouvais créer un précipité de mes précédentes pièces et en extraire de manière autonome les principes qui sont toujours combinés dans les créations ? Comment trouver la couleur de chaque principe, faire ressortir de façon claire et lisible des notions fondamentales : l’espace, le temps, le mouvement ? ». (C. Diverrès, dans I. Filiberti, « Blowin ou l’écriture en question », Les cahiers du CCNRB, 2007, n° 1, p. 6-7)

Claire Delcroix

dernière mise à jour : juillet 2014

Chorégraphie
Année de réalisation
2007
Année de création
2007
Lumières
Catherine Diverrès et Eric Corlay – Conseil lumière Marie-Christine Soma
Musique live
Seijiro Murayama (percussions), Jean-Luc Guionnet (saxophone)
Interprétation
danseurs Fabrice Dasse, Julien Fouché, Marta Izquierdo Munoz, Sing Im Kweon, Rafael Pardillo, Emilio Urbina, Thierry Micouin, Filipe Lourenço
Scénographie
Laurent Peduzzi
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