Vincent Mantsoe
Chorégraphe, interprète et professeur de danse, Vincent Sekwati Koko Mantsoe est né en 1971 à Soweto, township de Johannesburg (Afrique du Sud), dans le quartier de Diepkloof. Elevé dans une famille de guérisseuses (« sangomas » en zoulou) par sa mère, il assiste dès son plus jeune âge aux cérémonies rituelles de guérison lors desquelles il accompagne la transe des femmes (grand-mère, tante, mère) de ses percussions. Sa pratique chorégraphique personnelle se nourrit dans un premier temps des danses de rue influencées par les premiers clips vidéo, au nombre desquels ceux de Michael Jackson qu’il s’amuse à imiter aux côtés de son ami d’enfance Gregory Vuyani Maqoma. Ensemble avec d’autres camarades du township, ils créent un groupe de danse de rue, The Joy Dancers.
Dans cette période où il se décrit comme « punk with a perm », Vincent Mantsoe réchappe de justesse d’un grave accident de voiture grâce aux soins de sa mère. Cette « renaissance » comme il en parle, lui fait prendre conscience de la valeur de son héritage spirituel. Chacune de ses prises de parole sera dès lors l’occasion d’évoquer ses croyances ancestrales ou les voix auxquelles il se livre quand il danse.
Devenu un étudiant studieux grâce à l’obtention d’une bourse en 1989, il suit un stage de formation au sein de la Moving Into Dance Company Mophatong (MIDM), l’une des premières compagnies multiraciales d’Afrique du Sud dirigée par Sylvia Glasser qu’il intègre à l’issue du stage. Il y étudie une vaste palette de techniques et de formes de danse, tant asiatiques et occidentales qu’africaines, tant en Afrique du Sud qu’en Australie, au Victoria College of Arts. En 1995 il participe aux 1ères Rencontres chorégraphiques de l’Afrique et de l’Océan Indien à Luanda avec la compagnie MID, et signe la pièce « Gula Matari » qui remporte le premier prix.
Devenu directeur artistique associé de la compagnie MIDM en 1997, il y crée de nombreux solos et pièces d’ensemble, mais collabore aussi avec d’autres compagnies en Afrique du Sud (Ballet Theatre Afrikan), aux Etats-Unis (Dance Theatre of Harlem), en Suède (Skanes Dans Theatre), Israël (The Inbal Dance Company), et au Canada (Collective of Black Artists).
L’art chorégraphique qu’il développe alors marie la danse traditionnelle africaine à des influences contemporaines, aborigènes, asiatiques, indiennes, balinaises, s’ouvre au ballet, au Tai-chi et à différents arts martiaux, pour forger un style personnel dans la veine de l’afro fusion. Lauréat de nombreux prix, Vincent Mantsoe mène une carrière internationale, particulièrement au Japon, aux États-Unis, au Canada.
Les exigences de sa carrière internationale l’amenant à renoncer à ses responsabilités de directeur associé en 2001 pour en devenir consultant artistique, Vincent Mantsoe fonde par la suite sa propre compagnie en 2005, aux côté de son épouse, la danseuse Cécile Maubert, qu’il rencontre en travaillant avec le chorégraphe marseillais Michel Kelemenis en 1999. Basé à Saint Pont en Auvergne, il présente en ces termes la philosophie qui sous-tend le travail de l’Association Noa-Cie Vincent Mantsoe : « The spirit of dance and Ancestors are the source of the work, The free mind cannot be separated from the natural force, that ultimately create a unique way of executing different forces, which can lead to the process of transformation between the past and present ».
Malgré cette implantation française, Vincent Mantsoe affiche clairement son identité sud-africaine : « I’m a South African choreographer in France, not a French choreographer ». La création de Skwatta lors du festival Jomba ! (Durban) en 2012 témoigne ainsi de son ancrage dans la société sud-africaine contemporaine : la pièce s’inspire en effet des campements de fortune qui fleurissent à travers l’Afrique du Sud.
Sources : V. Mantsoe ; M.-C. Vernay, «Vincent Mantsoe : « Transmettre un message social de rébellion »», Libération, 2 juillet 1997 ; « City Press » d’août 2012 ; Martha Bremser, Lorna Sanders, « Fifty contemporary choreographers », Abingdon : Taylor & Francis, 2011 ; Salia Sanou. « Afrique danse contemporaine », Pantin : Centre national de la danse, 2008, p. 84-85