Mlu Zondi
Né en 1975 à Clermont, township de Durban, Mlungisi Zondi est élevé par sa tante maternelle au décès de ses parents, et grandit seul parmi les adultes. Il dira plus tard de cette solitude qu’elle lui a inculqué un précepte essentiel pour son travail actuel : « I have to be inside myself and be comfortable there » [1]. Dans les années 1980, en fervent admirateur de Michael Jackson, il se livre devant ses camarades à des imitations dans lesquelles il fait sensation et se découvre des facilités pour la danse. A travers les démonstrations de pantsula qu’il pratique activement dans les années 1990, il découvre un moyen efficace de s’exprimer et décide d’entreprendre des études supérieures. Il doit travailler trois ans dans une station service avant de pouvoir intégrer la Durban University of Technology (DUT) en 1998 pour y étudier le théâtre, le spectacle et la danse. La ténacité et l’endurance dont il témoigne alors se retrouveront dans le travail qu’il développe par la suite : « This tenacity and endurance is still evident in his work, in a context where the level of experimentation and risk in performance culture is rare ». Au cours de ses études et au contact de Jay Pather, directeur du Siwela Sonke Dance Theatre et professeur au DUT, Mlu Zondi oriente son travail vers la performance.
Diplômé quatre ans plus tard, il s’essaie au « commercial and corporate theatre », une activité consistant à produire des spectacles pour des commanditaires privés en rapport avec « une nouvelle culture d’entreprise, le concept et les qualités d’un nouveau produit ou encore (…) des thématiques plus socio-éducatives comme la prévention du sida, l’hygiène… » [2]. Déterminé à travailler à son propre compte, il imagine des dispositifs performatifs et expérimentaux, souvent hybrides, qui traitent de la définition de l’identité, portés par la structure Sololique Projects qu’il a fondé encore étudiant. La façon dont il présente ses recherches artistiques révèle la dimension profondément intime et personnelle dont il les charge : « My work is a direct result of the frustrations in trying to find creative ways through which to express myself » [3]. Autant d’occasions d’affronter ses propres démons à ses yeux : « My works are my own confrontation with issues that haunt me : identity, relationships and childhood memories. Suppressed emotions emerge during creations and perfomances that become therapeutic » [4].
Son talent conjugué à sa détermination et à son sens de l’opportunité le propulse rapidement à l’échelle internationale. Débutant en 2001 par une résidence durbanite auprès du Floating Outfit Project dirigé par Boyzie Cekwana, il obtient l’année suivante une résidence de six semaines au Théâtre Sévelin 36 (Lausanne) organisée par Pro Helvetia, à l’issue de laquelle il présente un solo intitulé « Soliloque – Rafiki » lors du Festival international de danse de Lausanne. Il bénéficie par la suite d’une résidence du FNB Dance Umbrella de Johannesburg (2003), de la Seoul Performing Arts Company en Corée du Sud (2007), des Bains:Connective Art Laboratory et du KVS Theater de Bruxelles, de la Rodriguez-Amat Foundation of Contemporary Arts de Barcelone (2008), ainsi que de la Kunst:Raum, annexe allemande du Jozi Art:Lab sur l’île de Sylt en Mer du Nord (2009).
En 2004, sa performance « Identikit » est présentée dans le cadre de l’exposition Young Artists Project de la KwaZulu-Natal Society of Arts (KZNSA) Gallery. Annoncée comme une métaphore de la condition noire dans un monde dominé par les blancs, cette performance en deux volets parle aussi de la difficulté d’être différent. Le premier volet se déroule à l’intérieur de la KZNSA Gallery et met en scène Mlu Zondi sur l’échiquier géant d’un jeu traditionnel d’Afrique du Sud, le mlabalaba ; dans le second volet, Mlu Zondi parade à travers la ville jusque dans l’eau de la plage nord de Durban, accoutré d’un costume composés de sacs poubelle colorés et de lunettes de soleil géantes. Le travail de création de M. Zondi, à l’image de cette pièce, cherche à bousculer les tabous et à sortir l’art de la performance des contextes scéniques habituels.
En 2006, sa pièce « Silhouette » créée en collaboration avec Ntando Cele, est récompensée par un prestigieux MTN New Contemporaries Award. Elle reste une expérience à part dans son œuvre puisque l’unique représentation scénique. Plus à l’aise dans le voisinage des arts plastiques (musée, galeries…), il préfère en effet que les spectateurs jouissent de leur liberté de mouvements pour accueillir ses performances : « I like people to come in and watch as long as they like. Maybe they walk away after five minutes, maybe they stay for an hour ». Ces dispositifs font appel à l’exceptionnelle capacité de concentration qu’il cultive : « When on stage, Mlu Zondi is very focused. No distraction, just concentration, continuous movement, sometimes repetitive. Furthermore, I don’t get tired as long as there is music (…) After performing one of his pieces that also deal with issues of race and politics as well as identity, Mlu Zondi feels concentrated, open minded, clean. “Performing is my own way of spiritual meditation” » [5].
Ses œuvres vidéos sont présentées dans le cadre du Guth Garfa Documentary Festival en Irlande (« Mirage ») et à la KZNSA Gallery de Durban (« Despotica ») en 2009. Lauréat de nombreux prix et distinctions (Jomba ! en 2003, KZNSA en 2004, National Arts Council of South Africa, NAF Main Festival Grant, Jomba, FNB Dance Umbrella et MTN New Contemporaries Award en 2006, National Art Council of South Africa et Pro Helvetia SA en 2007, Africalia en 2008), il est lauréat de la Standard Bank Young Artist Award pour la danse en 2009 grâce auquel il présente « Cinéma » dans le cadre du National Arts Festival de Grahamstown en 2010, une création expérimentale multimédia ambitieuse pour quatre danseurs et projections.
Performeur exceptionnel de l’avis des critiques, M. Zondi a aussi fait ses preuves dans le domaine de l’administration artistique et culturelle : de 2005 à 2006, il endosse ainsi avec succès le rôle de coordinateur régional du réseau des arts vivants de la région KwaZulu-Natal (PANSA KZN) et travaille comme consultant pour l’agence de consulting artistique Cultural Radius.
[1] Mlu Zondi, http://www.jozi-artlab.co.za/en/klip_town_art_project/south_african_artists-sylt_mlu_zondi.php, 2009.
[2] O. Hespel, Robyn Orlin, fantaisiste rebelle, 2009, p. 26.
[3] M. Zondi cité dans le programme de la KZNA Gallery pour « Despotica », 21 avril-10 mai 2009, http://www.kznsagallery.co.za/exhibitions/despotica.htm.
[4] http://www.artlink.co.za/news_article.htm?contentID=23366, 11 mai 2009.
[5] Site internet du Jozi art:lab, 2009 : http://www.jozi-artlab.co.za/en/klip_town_art_project/south_african_artists-sylt_mlu_zondi.php
Bibliographie
Nondzube, Nomfundo. « Mlu Zondi takes audence by surprise », http://www.grocotts.co.za, 2 juillet 2010
Buys, Anthea. « Filmic feet », Mail and Guardian, 25 juin 2010
« Award winner for dance straddles spaces », http://www.artlink.co.za, 11 mai 2009
Williamson, Sue. « South African Art Now », Harper Design, octobre 2009, p. 142.
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Dernière mise à jour : février 2014