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À Contre Danse
Soyons clairs, ce soir vous ne verrez pas de contredanse : « À Contre Danse » est une pièce sur le vécu, l’expérience et la mémoire. Comment le corps et l’esprit, suite à un travail spécifique, au travers de la contredanse, digèrent-ils et retranscrivent-ils le matériel appris ? Pour dépasser son vécu de la danse, son expérience de danseur et le substrat des créations de chorégraphes aînés, Davy Brun, après quelques pièces, a ressenti la nécessité de se ressourcer aux origines de la danse classique. La contredanse, danse populaire anglaise connue dès le XVIe siècle, est arrivée en France à la fin du XVIIe. La contredanse française (étymologiquement «danser l’un en face de l’autre») a alors donné naissance à une forme standardisée : le quadrille. Elle participe donc d’un univers de codes qui requiert une médiation des sentiments. L’accès à l’autre doit emprunter des canons symboliques rigoureux. Cette pièce s’est construite après un travail préparatoire avec Cathy Flahaut : «espace carré, vision démultipliée de déplacements à deux à l’unisson, les dessins s’enchevêtrent, les parcours se mêlent, se démêlent, et comme dans un kaléidoscope, le mouvement s’organise et construit ses figures». Que faire de cette danse aujourd’hui ? Comment la traiter ? Que faut-il en garder ? Quel est l’intérêt de la faire évoluer ou de la faire revivre ? Notons pour commencer que, si cette danse était une danse de représentation qu’une société se donnait d’elle-même, elle ignorait le rapport frontal entre le performeur et son public.
Davy Brun : «J’ai eu alors davantage besoin de faire vivre ce que je n’ai pas trouvé dans cette danse : utiliser le bras, le saut et aussi le contact physique, bref, tout ce qu’elle interdit. Il m’a été impérieux, plutôt que d’essayer de refaire ou retranscrire la contredanse, de construire notre travail sur ce constat. Quelle part du passé et quelle trace reste-t-il en nous ? Peut-on (ou comment) se débarrasser du passé et (ou) de notre vécu ? Sous quelles formes les influences apparaissent-elles ?»
La musique accompagne cette évolution de la pièce dans un univers contemporain tout en citant littéralement Haendel. Elle propose un collage où la musique du XVIIIe siècle s’allie avec des nappes sonores et la création musicale de Julien Tarride.
Deux mannequins sont utilisés pour la mise en scène. Ils font référence au passé de la contredanse, ils permettent aussi de garder le caractère du vis-à-vis, base du quadrille, dans l’écriture scénographique. Mais ancrés dans le présent, leur charisme par défaut réactualise l’éternelle question : comment atteindre l’autre, jusqu’où lui signifier ma présence consciente et incarnée ? Ce dis- positif permet ensuite de retrouver l’axe des recherches des deux danseurs par une succession sans fin de portés, d’en- roulements des corps… reconsidération de l’espace nécessaire à la relation. Le vide qui façonne les contours d’une relation fait place à un effarouchement apprivoisé.
Source : Maison de la Danse de Lyon